2003 janvier: La fierté du désert

Avec Charly, Daniel, Mickaël et Vincent.

Revenir sur soi avec force

Voici donc le cinquième groupe de jeunes que je viens de rejoindre au gîte de la Sauvette, en Ardèche, en ce début d’année 2003 pour écrire, faire le point, digérer les difficultés et les découvertes offertes par le Sahara, cet automne.

Charly, Daniel, Mickaël et Vincent rêvent de changements,  de bouleversements, et pour parler comme les rugbymen, ils s’apprêtent maintenant à transformer l’essai engagé au Niger.

Ces garçons attachants évaluent le chemin parcouru mais ils connaissent aussi les distances qui s’ouvrent devant eux, offertes à leur volonté manifeste de changement pour aller vers demain, une formation, un travail, une autre manière de vivre…

Une nouvelle fierté les anime tous les quatre, comme cette envie de reconnaissance qui va se jouer dans leurs relations familiales. Ne plus jamais décevoir, arrêter de faire de la peine, vaincre le passé et casser le rôle pré-établi de celui qui dérange et fait souffrir.

Nos quatre mousquetaires du désert s’inquiètent cependant de leurs capacités a vaincre leurs peurs, à résister aux spirales de la facilité. La prise de conscience d’une certaine fragilité les angoisse un peu.

Au désert, ils ont commencé à apprendre à se connaître en découvrant d’autres valeurs, d’autres modes relationnels que ceux qui s’imposent en marge de nos villes.

Au désert, les Hommes Bleus leur ont montré le sens du respect, une autre manière de rencontrer et d’appréhender l’Autre. Questionnements intimes et interrogations personnelles sur le sens de sa propre vie sont nés dans les grandes dunes et sur les sentiers escarpés et pierreux de l’Aïr. Comment demeurer insensible à l’immense richesse humaine des chameliers touareg qui ont su les guider sur le chemin de leur propre existence? Comment pourraient-ils oublier les pudiques leçons de vie, données dans les gestes, cette singulière manière de vivre et de comprendre des nomades ?

Je connais aussi Bachar, Boubakar, Ibrahim, Ahmed, Abdelkrirn, Bay et les autres Touareg de la caravane pour avoir fait le grand voyage au printemps dernier avec d’autres jeunes et je ne suis pas surpris que ces hommes d’ailleurs aient tant marqué les quatre adolescents.

La confrontation avec ces parrains peu communs conduit à un retour sur soi, à une mise à nu des personnalités.

C’est ce dont demain sera fait qui questionne maintenant. Non, tout n’est pas acquis et les jeunes le savent bien.

Un impérieux besoin de formation pour rattraper le temps et les chances perdues reste à combler. Leurs mots se cherchent, des idées s’ébauchent, leur langue devra s’enrichir. Tout cela les fragilise, les affaiblit.

Mais si la faiblesse d’acquis scolaires bien utiles pour leur avenir est encore réelle, leur désir farouche de se sortir des ornières sociales et judiciaires les guidera, j’en suis convaincu.

Alors, garçons, sachez persévérer et foncez dans ces choix de vie déjà  identifiés.

Amoureux des chevaux, Daniel travaillera, j’en suis sûr, en milieu hippique. Vincent s’épanouira dans l’élevage et le monde rural. Mickaël deviendra un plombier avenant sans jamais être avare d’une belle joie de vivre. Charly saura teinter de clair les murs des appartements à refaire.

Au fait, Charly, sais-tu que de la peinture de bâtiments à la peinture tout court, il n’y a au fond qu’une question de persévérance, parce que pour le talent, no problem…

Alain Bellet

 

Transformations

C’est bon, d’être la fierté de ses parents

Pourtant, je ne me sens pas encore assez fort

Après avoir traversé un désert brûlant

Je bouge,je réfléchis,je fais des efforts.

 J’ai découvert la parole et la confiance données

J’ai enterré ma haine dans le sable

Ça sera possible, mais en dehors de mon quartier

Et cela deviendra encore plus agréable.

 J’ai peur de ne pas avoir de travail

Comme du verre, je me sens encore un peu fragile

Je pense aux Touareg, battant la paille

Et marchant doucement dans un oued d’argile

 J‘ai peur de ne pas pouvoir rentrer chez moi

Je ressentais de l’émotion pour Ibrahim

J’y penserai tous les jours, mois par mois,

Aux autres aussi, et surtout A bdelkrim.

Au désert, j’ai gagné le respect

Nous sommes moins fainéants qu’avant

Je ne serai plus jamais suspect

Plus motivés, bien plus fiers qu’en partant

J‘ai gagné le droit de m’en sortir

Avec courage et volonté

En parcourant les montagnes de l’Aïr

J’ai gagné la liberté.

 

Texte collectif

 

 

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